Aux marches du 10e
Introduction
Un goût d'aventure soudain nous a pris comme cela, un certain printemps de 1998. Après avoir clamé haut et fort, pendant des années, une position " d'autonomiste du 10e ", dit comment le simple fait de sortir le bout de l'orteil de ce formidable arrondissement nous donnait des palpitations et déclenchait même chez certains d'entre-nous des crises aiguës d'agoraphobie, voila que nous nous décidons à explorer les bordures du quartier.
Acheter les droits de l'homme chez Tati
Impossible d'échapper à l'inévitable Tati quand on sort du 10e, par Barbès ou République. Du marché Saint-Pierre, paradis des tissus, au Carreau du Temple, paradis du cuir et des vêtements, le roi de la fringue s'est incrusté en 1948 dans le Paris populaire et industrieux de la confection.
1948 : Bon sang, mais c'est bien sûr ! Tati a 50 ans. Tout comme
la Déclaration universelle des droits de l'homme. On chuchote d'ailleurs qu'on va
bientôt les marier ces deux-là, (la place a finalement été prise par Benetton)
pour faire… un beau centenaire. Il suffit de lire le discours maison dans Tati
Mag pour le croire sans la moindre hésitation. Par exemple, dans le n° 2,
sous la plume d'Isabelle Adjani : " À portée de main, à la portée
des tons, tout le monde peut se mettre Tati sur le dos et Tati peut bien porter
tout le monde sur son dos. " Deux numéros plus tard, Françoise Arthaud
joue les clientes chez Tati : " Je suis une fille du 16e,
mais je n'ai aucune honte à me balader avec un sac Tati. Toute la vieille Europe
coloniale se retrouve là, toutes les populations que nous avons arrachées à leur
pays pour les faire trimer dans les usines. Nous avons une immense responsabilité
face à ces gens. Je trouve formidable de leur proposer des produits de qualité pas
chers. "
On croit rêver ! Mais non. On peut aussi lire un peu plus
loin : " Tati ouvre le dimanche dans la banlieue parisienne, un nouveau
service Tati, pour ceux qui travaillent toute la semaine et qui regroupent leurs
achats le jour du marché du dimanche matin. " Et ceux qui travaillent le dimanche ?
Et pour le politiquement correct, quelques slogans :
- " Pour Tati
les plus bas prix, c'est pas un DÉTAIL "
- " Chez Tati, au plus bas
prix, personne n'est ÉTRANGER ", ou encore
- " Chez Tati, on peut payer
SANS PAPIER "…
Si nous avons pu apprendre du service de communication que
les bureaux parisiens gardent un contact permanent avec les sources de production
asiatiques, et que " les achats et l'import " ont gardé la tradition du
paiement comptant à la livraison, la réponse est restée énigmatique quant à l'adhésion
au code de conduite élaboré par le collectif " De l'éthique sur l'étiquette ".
" Jouez le jeu : faites gagner les droits de l'homme "
Le collectif " De l'éthique sur l'étiquette " regroupe 46 associations
ou organismes, dont, parmi les plus connus : Agir Ici, la CFDT (notamment,
les sections habillement, cuir, textile), la CGT (mêmes sections), la CIMADE, la
Fédération des artistes du monde, la Ligue des droits de l'homme, le mensuel
60 millions de consommateurs.
Après les campagnes " Libère tes fringues "
en 1996, " Soyez sport " en 1997, le collectif " De l'éthique sur
l'étiquette " a lancé en janvier 1998 la campagne " Jouez le jeu :
faites gagner les droits de l'homme ". Jusqu'à la Coupe du monde en juin 1998,
les consommateurs, signataires de cartes postales demanderont aux grands distributeurs
d'articles de sport d'adopter un code de conduite les engageant à faire respecter
par leurs fournisseurs les droits de l'homme au travail : absence d'exploitation
d'enfants, interdiction de l'esclavage, respect de la liberté syndicale, salaires
décents, non discrimination (sociale, religieuse, sexiste), etc.
Les entreprises
s'engagent aussi à accepter qu'un organisme indépendant et transparent contrôle
le respect du code de conduite qu'elles ont signé.
Le collectif " De l'éthique
sur l'étiquette " compte créer à terme un " label social " garantissant
sur l'étiquette le respect des droits de l'homme.
La bonne conscience des consommateurs
exigeant, au cours de ces campagnes, " une qualité sociale " des produits
qu'ils achètent finira sans doute par interférer sur l'image que les distributeurs
cherchent à avoir auprès du public.
Élisabeth Pascot
Pour en savoir plus, contactez :
Agir ici,
14, passage Dubail
75010
Tél. : 01 40 35 07 00
Fax : 01 40 35 06 20
Courrier électronique :
agirici@globenet.org
Fédération Artisans du monde
67, avenue de la République
75011
Tél. :
01 49 29 95 15
Fax : 01 49 29 95 25
Internet :
http://www.crc-conso.com/etic/
Petites histoires de la légende Tati
En 1948, Jules Ouaki, juif d'origine
tunisienne et sa femme Éléonore, fille d'ouvriers hongrois, ouvrent une petite boutique
rue d'Orsel, à l'angle de la rue de Steinkerque. L'argent leur aurait été prêté
par une personne dont le nom n'a jamais été dévoilé. Jules pense baptiser son affaire
du surnom de la mère, Tita, mais il s'avère qu'il existe déjà un magasin de ce nom.
Qu'à cela ne tienne, Jules connaît le verlan : Tati naquit.
Jules a plus
d'un tour dans son sac (qui n'était pas encore en Vichy rose) ; il applique
un principe simple : acheter comptant de grandes séries d'articles et limiter
la marge bénéficiaire. Plus révolutionnaire encore, la marchandise est présentée
sur des tables, on peut la toucher sans se faire incendier par une vendeuse. Enfin,
pour gagner de l'espace, pas de vitrine de présentation.
Le succès de la formule
est fulgurant, Jules rembourse son emprunt plus vite que prévu et achète la boutique
d'en face. Les deux premières échoppes de la rue de Steinkerque existent toujours,
elles ont gardé leur charme rétro.
Depuis, la famille Ouaki a progressivement
acheté presque tous les immeubles situés entre les numéros 2 et 42 du boulevard
de Rochechouart.
En 1983, Jules Ouaki meurt, laissant la succession à son fils
aîné Grégory, qui décède l'année suivante. C'est Fabien, le cinquième des enfants,
qui poursuivra l'ascension familiale à partir de 1991, après quelques années de
régence assurées par Éléonore.
À 16 ans, Fabien, après avoir osé rêver devenir
batteur de rock, part plusieurs années en Grande-Bretagne. Il se marie contre la
volonté de son père, et revient, fils prodigue, mûri de multiples expériences. Mais
il lui faudra faire ses preuves avant de reprendre l'affaire familiale.
Tati, ou l'art est dans la rue
Fabien Ouaki ne vise pas que l'extension de l'enseigne Tati, c'est un amateur
d'art et il s'emploie désormais à associer à l'image des " plus bas prix "
celle d'une popularisation de l'art.
Ainsi, le couturier Alaïa lança une collection
Tati qui fit fureur en 1991. Puis Andrée Putman, styliste, crée la griffe " La
rue est à nous " en 1993.
Cette année, pour fêter son cinquantenaire, Tati
donne naissance à ARTATI qui aura vocation de " démocratiser l'acte créatif ".
Pour commencer, en 1998, trois expositions :
- Au musée des Arts décoratifs,
107, rue de Rivoli, en partenariat avec le magazine Photo, du 12 mars au 4 avril.
- À la galerie Art's Factory,
48, rue d'Orsel, à partir du 16 avril : L'univers
Tati vu par de jeunes artistes.
- À la Halle Saint-Pierre,
2, rue Ronsard,
du 18 juin au 31 juillet, qui reprendra entre autres l'exposition du musée des Arts
décoratifs.
ARTATI, ce sera aussi l'ouverture de boutiques d'artisanat et la
création d'un label de musique, dont le premier titre sera le groupe de rock dirigé
par Fabien Ouaki lui-même. Et ce n'est pas tout !
L'affaire est dans le sac !
Cette année, vous pourrez collec-tionner les sacs Tati à condition d'aller chaque
mois faire un nouvel achat.
Le Vichy rose des robes de B. Bardot, emblème Tati
depuis 1950, est revu et corrigé par douze artistes différents de janvier à décembre.
" L'art " va se promener dans la rue, le métro et les cités de banlieue.
Il suffisait d'y penser.
Pour en savoir plus sur la pensée de Fabien Ouaki, on
peut lire son livre " La vie est nous ", écrit à partir de ses entretiens
avec le Dalaï Lama, dont il est un fidèle ami (il finance tous ses voyages en France).
Il faudra attendre mai 1998 pour le trouver en poche, aux éditions Pocket, au plus
bas prix, bien sûr !
Élisabeth Pascot
UNMKRHV
L'Union nationale des masseurs kinésithérapeutes rééducateurs handicapés visuels, fondée en 1926 par Raymond Lejal, regroupe des salariés ou des libéraux, diplômés d'état. Son rôle est de défendre leurs intérêts et de promouvoir leur travail.
L'Union contribue au perfectionnement scientifique et technique de ses adhérents
par l'organisation d'une bibliothèque sonore, de conférences, de stages, et la publication
de revues. Elle est représentative de ses membres auprès des pouvoirs publics.
Elle reproduit sur cassette, et prochainement sur disquette, différentes publications
professionnelles les rendant ainsi accessibles à ses adhérents.
Par son esprit
mutualiste l'association aide les débutants à s'installer en leur octroyant des
prêts sans intérêt, soit pour la mise en place de leur propre cabinet, soit pour
l'achat de matériels professionnels palliatifs de la cécité. Ces prêts peuvent être
destinés à soutenir ses membres dans des actions de promotion, comme par exemple
l'accès aux écoles de cadres kinésithérapeutes.
A son siège, elle dispose d'un
centre de soins kinésithérapiques permettant aux professionnels débutants d'exercer
une activité libérale : complémentaire à une autre activité libérale ou salariée,
leur mettant ainsi le pied à l'étrier.
Les masseurs kinésithérapeutes handicapés
visuels y exercent leur activité sous leur propre responsabilité conformément à
la législation en vigueur.
L'association assure aux kinésithérapeutes des stages
de formation continue. Un de ses buts est d'organiser des stages de perfectionnement
professionnel, et ainsi de permettre un suivi des évolutions techniques dans tous
les domaines. On peut citer comme exemple l'informatisation des cabinets libéraux,
et la mise en place de la télétransmission avec la CNAM, ce qui permettra, pour
les kinésithérapeutes conventionnés, de traiter directement les dossiers administratifs
de leurs patients.
Toutes ces actions sont faites dans un esprit d'intégration
professionnelle maximale.
Pour compléter sa fonction de formation, L'UNMKRHV
dispose d'une phonothèque professionnelle sur cassettes audio comportant l'enregistrement
de plus de 500 ouvrages techniques et scientifiques concernant la kinésithérapie.
L'Union est géréet par un conseil d'administration composé de quinze membres, tous
handicapés visuels, avec un secrétariat et une permanence à son siège.
L'association
est membre du CNPSA (Comité national pour la promotion sociale des aveugles), comité
interlocuteur du gouvernement, et par voie de conséquence membre de l'Union européenne
des aveugles et de l'Union mondiale des aveugles. Ainsi, elle contribue à la défense
des intérêts des handicapés visuels sur le plan national et international.
Elle
est reconnue représentative des masseurs kinésithérapeutes handicapés visuels par
le ministère de la Santé. Ce qui lui donne droit de siéger au Conseil supérieur
des professions paramédicales. Ses représentants défendent le statut du masseur
kinésithérapeute handicapé visuel, en même temps qu'ils contribuent à élaborer les
textes qui régissent la formation et l'exercice de la profession.
Jean-Baptiste Leymarie
UNMKRHV
85, rue d'Hauteville
75010
Tél. : 01 48 24 17 00
Arc-en-ciel : un lieu plein de vie
Séropositif, malade du sida, proche d'une personne atteinte, on est confronté à des difficultés d'ordre physique, psychologique ou social.
Aux marches du 10e, 52, rue du Faubourg-Poissonnière, au fond d'une
jolie cour, voici un endroit réellement convivial. Dès l'entrée, on aperçoit de
la documentation, une décoration chaleureuse, au fond, une salle à manger, un bout
de jardin et, dans ce bel espace, des gens dont l'objectif est de se sentir bien.
Grâce à l'association Aides, à des partenaires financiers, à des bénévoles, toute
une série d'activités et de services est mise gratuitement à disposition.
Pour être dans une meilleure forme physique
Par une bonne nutrition : suivi individuel, petits déjeuners d'information,
conseils d'une diététicienne. Il y a même une cuisine. Elle permet d'y tenir des
ateliers pratiques par thèmes, tels que " les troubles digestifs ".
En contactant l'énergie qu'on a en soi par l'hata yoga, le taï-chi, la sophro-relaxation,
le travail sur la voix, sur les cinq sens, le massage.
En expérimentant son ressenti
par le théâtre, la danse, des ateliers d'écriture, de peinture, au sein d'une chorale.
Pour une meilleure intégration sociale
L'évolution récente des traitements pose le problème des personnes qui ont dû
interrompre leur travail pour une longue durée et se trouvent désormais en situation
de pouvoir, et vouloir, reprendre un emploi.
Un nouveau programme, Envol, favorise
la recherche d'emploi à temps partiel, propose un stage de redynamisation ou de
tester, sans risque, une reprise d'activité dans une entreprise partenaire d'Arc-en-ciel.
Une fois par mois se tient une consultation juridique sur rendez-vous. En cas d'urgence,
appeler le numéro Azur de Sida Info Droit au 08 01 63 66 36.
Les possibilités
de communication et d'échange au cours de suivis individuels, de groupes de parole,
de soirées débats, etc.
De plus, Arc-en-ciel fonctionne comme une maison. On
trouve une ambiance familiale dans les deux salons (bibliothèque, télévision, piano,
jeux de société) et la salle à manger. De 100 à 110 repas sont servis par jour,
avec 3 catégories de menus : enrichi, équilibré, trouble digestif ; les
tarifs vont de 5 à 40 F selon les revenus, des tickets assurant la discrétion.
Le prix est de 50 F pour les visiteurs extérieurs.
Les " nouveaux "
sont invités à manger avec d'autres afin de se donner le temps de faire connaissance.
Benedito propose même une coupe de cheveux gratuite aux participants bénéficiant
de repas aidés.
Pour des échanges de coup de main, Yves, à l'accueil, organise
le service des petites annonces.
Le partenariat avec d'autres associations permet
la mise à disposition de documents plus spécifiques : prévention sida avec
le CRIPS, concernant les enfants touchés avec " Dessine-moi un mouton "
et " Sol-en-si ", les usagers de drogue avec " Le moulin joli ",
des dépliants en anglais, etc.
Un lieu de mémoire permet de se recueillir et
d'assister une fois par mois au dévoilement de patchworks avec l'association " Le
patchwork des noms ".
Arc-en-ciel est aussi un espace de culture et de plaisir
où sont proposés des spectacles variés, des conférences et des expositions ouverts
à tous.
Événements en mars
Samedi 21 mars, Arc-en-ciel fête ses deux ans ! Soirée dansante.
Vendredi
22 mars : 21 h à 22 h, poètes et musiciens.
Samedi 28 mars : concert
de la chorale l'Echo râleur.
Mardi 31 mars : 20 h, atelier santé, " Les
effets secondaires des médicaments : que faire ? comment les atténuer ? "
Du 31 mars au 18 avril, exposition Claude-Max Lochu.
Lorsque l'on souhaite devenir
usager, un entretien confidentiel permet d'évaluer besoins et attentes, de s'assurer
qu'Arc en ciel peut y répondre. Une carte anonyme est alors remise qui permet d'accéder
au lieu lors de visites ultérieures.
Vous disposez d'un talent particulier et
d'un peu de temps ? Vous désirez vous investir ? N'hésitez pas à partager.
Marie-Hélène Cayla
Arc-en-ciel
52, rue du Fg-Poissonnière
75010
Tél : 01 53 24
12 00
Ouvert du mardi au samedi de 11 h à 23 h.
Le Bruxelles-Vesoul passe par la rue d'Alsace
Le vingt et unième siècle pointe son nez aérodynamique dans nos gares. Thalys, le petit dernier de madame SNCF relie Paris à Bruxelles en quatre-vingt cinq minutes. On n'arrête pas le progrès, surtout s'il est lancé à la vitesse d'un TGV. Certains peuvent y voir l'un des signes de nos temps modernes. Et bien, qu'ils sachent que nous sommes un peu en retard en comparaison des prévisions des futurologues du siècle dernier. J'ai dans ma bibliothèque un livre qui descend souvent des rayons pour amuser mon fils " comment nos grands-pères imaginaient l'an 2000 ". Les cerveaux de la dernière promotion des écoles d'ingénieurs devraient consulter ces archives, un bric-à-brac d'inventions foldingues. à côté, le professeur Tournesol fait figure de piètre apprenti.
Tintin à Vesoul
Ainsi, grâce à la combinaison du chemin de fer et de la puissance électrique, nos voisins bruxellois viendront plus souvent en visite à Paris. Les Belges sont des aventuriers. Vous ne le saviez pas ! Souvenez-vous de ce jeune reporter toujours accompagné d'un petit chien blanc. Parmi le flot de passagers débarquant de la gare du Nord, quelques-uns poursuivent leur voyage vers d'autres destinations, j'en devine un qui a choisi Vesoul plutôt qu'Honfleur. Vous riez et croyiez la chose ridicule, ce ne serait pas la première fois qu'un citoyen du Bénélux se retrouve dans le chef-lieu de la Haute-Saône, vous auriez déjà oublié le grand Jacques, c'est pourtant grâce à lui que Vesoul a eu une notoriété mondiale. Il est donc imaginable qu'un reporter bruxellois désire enquêter dans cette ville située sur la ligne de Mulhouse, départ Paris-Est.
Le capitaine Haddock
En quittant Thalys, notre ami belge laisse derrière lui le progrès qui le transporta jusqu'ici à 300 kilomètres heure. Le plus rapide pour rejoindre sa correspondance reste une méthode déjà utilisée voilà plus de 500 000 ans par les pithécanthropes : la marche à pied. Comment, vous ne savez pas ce qu'est un pithécan-machin, décidément vous ne connaissez pas la littérature belge, c'est un classique dans les bulles du capitaine Haddock. Les deux gares ne sont toujours pas reliées par voie souterraine et pas encore par voie aérienne *, il reste les trottoirs. Dans ce quartier, il m'arrive souvent de renseigner des touristes qui ont perdu le Nord. Je les reconnais facilement, ils tournent leur carte dans tous les sens pour trouver l'Est. Pour les aider, je leur déclame ma récitation apprise en plusieurs langues européennes, à gauche rue des Deux-Gares, puis à droite rue d'Alsace, de là vous avez une vue remarquable sur la gare de l'Est, l'entrée est en bas des escaliers.
Ah, le Diesel
Si le train pour Vesoul est à quai, facile de repérer la voie, c'est celle d'où s'échappe un énorme nuage de fumée parfois noir, parfois bleu. Le bleu est plus joli les jours de soleil, on le confond avec le ciel, quelle tristesse le noir les jours de pluie ! L'odeur, elle, est commune aux deux couleurs, désagréable. Le progrès n'est pas arrivé jusqu'à la gare de l'Est. La locomotive diesel de la ligne Vesoul-Mulhouse déverse ses milliards de grosses particules dans l'air du 10e. Heureusement, une bonne quantité de ces particules est recyclée… dans les poumons des riverains ! Si l'on doit attendre encore des années un beau train électrique pour Mulhouse, il faudrait que des chimistes rigolos nous améliorent ces vapeurs de gazole. Je vois bien cette mission confiée à Gaston Lagaffe, " m'enfin " encore un belge, une fumée jaune parfumée à la banane et une verte à la pistache ! Si la loco tousse à pleins poumons, elle va partir, notre correspondant de Bruxelles doit accélérer le pas.
L'ai-je bien descendu
Connaissant très bien l'endroit c'est un peu honteux que je recommande aux touristes pressés la plus grande prudence pour la descente des escaliers de la rue d'Alsace. Ici, la pollution humaine et urbaine s'étale sur chacune des marches, une véritable exposition de détritus, tessons de bouteilles, papiers gras, urines et matières fécales. Les tags, sans véritable style artistique, maquillent cet ouvrage du XIXe siècle en recoin bétonné de banlieue, dommage. Je ne connais pas Vesoul mais j'espère que le bon air de Franche-Comté éliminera les particules collées aux bronches des voyageurs montés à Paris.
Gérald Masnada
PS : Si un lecteur connaît la raison qui poussa Brel à chanter Vesoul, qu'il nous le fasse savoir, je lui offre une compil'.
* Des farfelus de l'association Gare ! la
vie ont imaginé un circuit de passerelles entre les gares et le quartier des
Récollets, c'est original et pas si fou que cela. (contact 01 40 37 19 44 ).
[retour au texte]
Casernes de garde
L'arrondissement est pris en tenaille par deux casernes. Sur la place de la République, la caserne Vérines et, rue du Faubourg-Poissonnière, la caserne de la Nouvelle-France.
La caserne Vérines
La
garde républicaine veille sur la République. Pour cela, il a fallu faire de la place
pour construire une des plus importantes casernes qui peut accueillir environ 3 230
hommes. Cet endroit n'a pas été choisi au hasard, il commande et verrouille tous
les axes majeurs de l'Est parisien.
Anciennement caserne du Château-d'Eau, puis
du Prince-Eugène, elle porte maintenant le nom du lieutenant-colonel Vérines. Commandant
cette caserne pendant la seconde guerre mondiale, chef d'un réseau et héros de la
résistance, il est fusillé le 10 octobre 1943 à Cologne.
Cette imposante caserne
de 114 mètres de long a été construite en 1854, par Degrove sur l'emplacement du
Diorama de Daguerre, créé en 1822.
La caserne de la Nouvelle-France
Construite
en 1931 au 82 rue du Faubourg-Poissonnière, sur l'emplacement de l'ancienne caserne
des Gardes-Françaises érigée en 1772 par le maréchal duc de Biron.
Cette caserne
servit d'enceinte aux jeunes personnes qui étaient raflées dans les cabarets à cause
de leur attitude tapageuse et querelleuse. Ces jeunes étaient évidemment issus de
milieux très défavorisés ou sans famille. Ils étaient envoyés vers la nouvelle colonie
française au Canada qu'on appelait familièrement la Nouvelle France.
Édifiée
en bordure de l'enclos Saint-Lazare par le sieur Gouey, cette caserne comportait
deux corps de bâtiments parallèles séparés par une vaste cour. Elle pouvait recevoir
deux compagnies de fusilliers de 120 hommes et une compagnie de grenadiers de 110
hommes. Nous pouvons supposer que Hoche et Lefebvre ont pu y être encasernés.
Cette caserne était encore la propriété de la famille Gouey qui la louait à l'armée
lorsqu'elle fut rachetée en 1827 par Marion de la Brillantais qui la vendit au ministère
de la Guerre en 1830.
La caserne de la Nouvelle-France était devenue bien vétuste
et insalubre lorsqu'elle fut abandonnée par l'administration militaire en 1920 et
occupée par un service des pensions du ministère des Finances. Elle devint en 1926,
la propriété de la Ville de Paris qui la démolit et la remplaça par des bâtiments
qui sont actuellement occupés par plusieurs compagnies de Gardes Républicaines.
Des sculptures (trophées d'armes) provenant de l'entrée de la première caserne ont
été conservées pour la décoration de la façade du nouveau casernement.
Alain Jouffroy